Le départ, enfin !

Publié le par cap-sur-les-terres-australes.over-blog.com

La Réunion est sous des trombes d’eau. À peine sortis de l’aéroport, nous voici sous la pluie chaude des tropiques. « Et oui, c’est la fin de la saison des pluies, c’est un peu comme en Bretagne, non ? » C’est ça, mais en plus moite quand même. Notre air désemparé - pensez vous nous rêvions de soleil et de plage avant le départ pour le grand sud - fait sourire les locaux.

Au volant de notre petite voiture, nous voici sur la route du littoral qui nous mène de Saint-Denis, la grande ville du Nord, à Saint-Pierre, au sud. La route serpente entre les falaises et la mer. On devine dans les brumes, ce qu’on appelle ici les Hauts, les montagnes, les cirques et les volcans. La route enjambe une quantité impressionnante de ravines, qui charrient des cailloux en direct des sommets. Au bout de 80 km, parcourus sous des hallebardes d’eau chaude, Saint-Pierre et ses rues en pente nous accueille enfin.

La rue Dejean donne sur le front de mer et le petit lagon de Saint-Pierre. Dans le bâtiment des Terres Australes et Antarctiques Françaises, il y a des oiseaux partout : des manchots, des albatros, des pétrels. Il y a des timbres et des posters. François n’arrête pas de fermer les yeux. Il ne veut pas voir. Rien du tout, avant d’arriver là-bas.  Il veut garder le regard vierge du photographe, qui sait déjà d’avance qu’il va s’émerveiller.

Le préfet des TAAF, Rollon Mouchel-Blaisot, est soucieux. Une grève des entrepôts pétroliers paralyse la Réunion. Et si les soutes du Marion Dufresne, qui va nous emmener sur les îles, sont pleines, les cuves qui servent à ravitailler les groupes électrogènes des bases, sont vides. Et pas moyen de partir sans. « Vous voyez, ici, c’est l’administration à fond dans le concret. » Tout le monde planche sur une solution. « Rendez-vous demain à bord, on verra bien. »

Quai numéro 8, port est. Enfin. Le Marion Dufresne. Deuxième du nom, construit aux Ateliers et Chantiers du Havre en 1995. Un bateau de 120 mètres de long, spécialement prévu pour le ravitaillement des terres australes, capable de transporter du fret sous toutes ses formes : conteneurs, palettes dans les cales ou en pontée, du combustible dans ses cuves, un hélicoptère et, bien sûr, des passagers. Une belle étrave solide pour affronter les 40èmes. Des grues pour décharger sur rade. Des embarcations, les portières, aux airs de chalands de débarquement d’Omaha Beach. Mais aussi des cabines lumineuses et confortables, un grand salon et un bar mythique, une salle de conférence, des laboratoires pour les scientifiques… et 39 marins français et malgaches de l’armement CMA-CGM, qui arme le navire, qui, lui, est propriété des TAAF.

Grosse effervescence à bord, tout le monde cherche sa cabine. Il y a ceux qui partent pour six mois ou un an sur les îles australes, travailler sur les bases comme charpentier, boulanger ou électricien. Il y a les scientifiques, biologistes, géophysiciens ou climatologues, qui rejoignent leurs laboratoires. Et puis une petite vingtaine de touristes qui rêvent tous du voyage d’exception que seul le Marion peut offrir. Nous sommes 75 au départ, nous serons 120 au retour.

Sur le quai, les nouvelles ne sont pas bonnes. Pas moyen de charger le gas-oil. Il faut trouver une solution, le calendrier des rotations est serré et le bateau doit absolument revenir le 16 avril. En fin de journée, la décision tombe. La bateau va commencer par le ravitaillement de Tromelin, qui devait normalement avoir lieu en fin de rotation. En espérant qu’à son retour à la Réunion, dimanche, les entrepôts soient débloqués pour charger le gas-oil manquant.

« Bon, on commence par le dessert », sourit le commandant Pierre Courtes. Appareillage samedi matin, le Marion franchit la passe étroite du port. Route au nord. Première nuit en mer, premières discussions au salon, premières rencontres sur le pont, la découverte du ciel austral, la lune à fleur d’horizon et la Croix du Sud, le dîner au carré officiers. L’aventure commence.


Caroline Britz

Publié dans Jour 1

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H
<br /> Bonjour,<br /> La page descriptive des activites du Marion Dufresne oublie tout simplement que le navire est sous-affrete 217 jours par an par l'IPEV, pour realiser des campagnes oceanographiques. Bien qu'il ne<br /> s'agisse pas de l'objet de cette rotation, il aurait ete raisonnable de le mentionner.<br /> Cordialement<br /> Helene LEAU<br /> Responsable Departement Oceanographie de l'IPEV<br /> <br /> <br />
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A
<br /> C'est beau... Ô_Ô<br /> <br /> <br />
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A
<br /> un bonjour au CDT Courtes...je fus le premier cdt du MD en 1995 et vous lire ravive mes souvenirs. Profitez-de ce voyage unique ...c'est un privilège rare.<br /> Amicalement et bon vent !<br /> Alexis Souliman <br /> <br /> <br />
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B
<br /> Le début d'une belle aventure !<br /> <br /> <br />
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W
<br /> Coucou! Merci pour ce premier article, ça donne déjà une première idée de votre périple! J'espère que tout se poursuit bien, après avoir "commencé par le dessert"! Je n'imaginais pas une telle<br /> effervescence à l'embarquement! A tout bientôt et j'attends la suite avec impatience!!!!! Gros bisous! Wassan<br /> <br /> <br />
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